Très belle nouveauté que cette suite de Pour l'Empire de Merwan & Vivès.
On accompagne notre escadrille avancée dans une forêt profonde et hostile. L'arrivée dans un coin de paradis est accompagné par un changement de couleur, une profondeur de champ qui
nous éloigne des odeurs de sueur... vers celle des fleurs, des fruits, de l'herbe humide. On se repose, enfin ! Les guerriers redeviennent des hommes. Et étrangement, c'est l'arrivée des femmes
qui leur remet les armes aux poings les plonge dans leur armures. Comme toujours, ce sont les femmes qui nous foutent dehors du paradis terrestre ! Les scènes de "torture" et de combat dans
le village des femmes m'ont fait penser plus aux westerns de mon enfance qu'à une quelconque scène épique. L'honneur devant le boureau, le combat perdu sous les flèches des femmes impitoyables,
la fuite sur un chemin piégé...
La fin est géniale, je ne dis pas tout pour ne pas la dévoiler, mais la sorcellerie des femmes prend dans ce livre une place inégalée. Le mystère, la magie, la possession, l'avidité... une
allégorie de l'amour ? Deux mondes incapables de communiquer qu'autrement qu'avec leurs corps lors de combats ou de coïts, des femmes cruelles, des hommes sous le charme... l'image des relations
que tissent les hommes et les femmes depuis la nuit des temps ?
Les couleurs sur fond de papier usé est un artifice qui fait mouche : c'est très beau. Et Vivès m'envoute à point avec son dessin traçant justement les regards et les gestes.
En espérant une conclusion à la hauteur...
Tiens bin : une conclusion qui me fait douter de l'ensemble, elle me vient avec le 3ème et dernier volume de Jéronimus de Pendanx et Dabitch. Je me suis posé (je me la pose encore) la
question de garder ces 3 volumes dans ma bibliothèque. Il s'en dégage un flot d'horreur tel que je sais que jamais plus je ne remettrais le nez dedans.
Je me suis demandé ce qui avait poussé les auteurs à raconter cette histoire plutôt qu'une autre. Pourquoi raconter l'histoire de ce fou ? Parce qu'elle est réelle ?? A la limite, pour ceux qui
veulent, il y a le journal pour ça. Pour en tirer des "leçons" sur notre monde ? Ce que fait Dabitch, en tirant pas mal par les cheveux ces prémices du capitalisme. C'est maladroit, pas
évident, et un peu incompréhensible.
Le dessin avec ces couches de peintures est un exercice original, mais qui n'est pas assumé (Pendanx retravaille son encrage avec des coups de crayon qui dénaturent l'ensemble). Le résultat est
parfois limite (le contour des décors autour des personnages est à la truelle) comparé au boulot qu'on imagine derrière... et le dessin ne parvient pas à sauver ce récit qui ne dépeint que la
noirceur de l'âme. Jéronimus est un fou dont on ne saisi jamais le basculement vers l'horreur. On ne comprend jamais le basculement de ses hommes vers la cruauté. Dabitch se trompe en disant que
c'est à ce moment que l'homme est devenu un nombre qu'on pouvait éliminer (certains roi n'ont-ils pas fait certaines guerres au préalable ?). Son propos tombe à plat.
C'est juste une photo noire de notre âme noire. Et alors ? A quoi bon ? Y a rien d'autre dans la vie que ce noir brut, sans sens ?
Page noire est un récit classique, mais fichtrement bien fichu. Je ne suis pas amateur ni de Giroud ni de Lapière, mais il faut admettre que même si la fin est ultra-prévisible, il est
assez agréable de faire comme si non. Comme quand on lisait un bon vieux Greg dans tintin au début des années 70. Et donc, Futuropolis, éditeur classieux des prétentieux albums d'images de Blutch
bascule dans le bon vieux classique à papa. Bonne nouvelle.
Une journaliste est sur la piste d'un mystérieux auteur de roman qui se cache de tout, et n'est dupe de rien. Une jeune femme sort de prison et essaye douloureusement de faire sortir de sa tête
de vieux souvenirs qui se cachent d'elle. A ce jeu de chattes et de souris, on se trouve face aux souffrances des deux camps.
Le dessin de Meyer est parfait pour ce récit. Efficace et net. On pourra faire la fine bouche en regrettant un peu le manque d'imagination dans les mises en scène (tout ça est trop
plan-plan).
Mais voila, c'est une BD à lire, ne boudons pas notre plaisir.
La rentrée avant l'heure
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