Les Studios Hergé ont été créés en 1950 pour aider Hergé dans la réalisation des
aventures de Tintin ainsi que ses produits dérivés. A partir de 86, trois ans après sa mort, ils deviennent la fondation Hergé, dont le but n'est plus la création, mais
l'emmagasinement de pognon, oups, pardon : la protection de l'oeuvre.
Toute création qui sortait des studios était attribuée au nom de Hergé uniquement.
Seuls trois albums de la série Quick et Flupke, réalisés après le décès d'Hergé, sont attribués aux studios.
Avant le studio
Edgar P. Jacobs a été l'un des premiers collaborateurs d'Hergé, la toute première étant Alice Devos dont même Peeters n'a pas retrouvé la trace.
Sa vocation première a pourtant été musicale, il joue en 22 aux cotés de Mistinguett, et est engagé par la suite à l'opéra de Lille. Hergé a toujours eu du mal avec l'opéra... d'où la Castafiore
!
En 41, sur les conseils de son ami Jacques Laudy il rentre au journal Bravo où il réalise quelques travaux d'illustration. Il est chargé de colorier des fac-similés de la bande dessinée
américaine d'Alex Raymond, Flash Gordon (alias Guy L'éclair) et de cacher certains seins que l'on ne saurait voir. En 42, le stock de planches de la série est bloqué
aux USA. Jacobs est chargé de créer du faux Raymond, puis un pseudo Flash. C'est ainsi que nait le Rayon U (Ninie, sa première épouse, sert de modèle pour le
personnage de Sylvia et son ami Jacques Laudy, pour Lord Calder... et plus tard pour Blake).
E
En avril 41, à l'occasion de la première de Tintin aux Indes ou le mystère du diamant bleu, Jacques Van Melkebeke, coauteur de la pièce avec Hergé, présente son ami Edgar à ce dernier.
Fin 43, alors que Jacobs a seulement réalisé la moitié du Rayon U, Hergé lui propose de travailler avec lui. Edgar devient son premier collaborateur en janvier 44. Ils
prennent, de manière passagère, à eux deux le pseudonyme l'Olav. Il participe à la refonte de plusieurs aventures de Tintin dont Tintin au Congo, Tintin en Amérique, Le Lotus Bleu, Le
Sceptre d'Ottokar, Le Trésor de Rackham le Rouge, Les Sept Boules de Cristal et Le Temple du Soleil.
Jacobs dessine le décor de la couverture du premier n° du journal Tintin (le 26/09/46). Ses débuts au journal sont particulièrement durs. Il travaille le matin pour Hergé et pour tintin
l'après-midi et une bonne partie de la nuit à réaliser la première aventure de Blake et Mortimer : Le Secret de l'Espadon.
À cause de son emploi du temps surchargé, il confie à son ami Jacques Van Melkebeke (le modèle de Mortimer) la mise à l'encre des 18 premières planches du Secret de l'Espadon parues dans
le journal Tintin. Son contrat de travail avec Hergé prend fin en 48 mais il poursuivra l'aventure jusqu'en 52.
Le Studio
Le reste ne se fit pas d'une pièce, les collaborateurs arrivèrent petit à petit, et l'atelier ainsi créé prit le nom des Studios Hergé en 1950.
- Bob DeMoor arriva juste avant la création officielle du studio, et y passa toute sa vie... sacrifiant réellement sa propre carrière (gamin, quest-ce que j'aimais
Barelli ou Cori le moussaillon !). Il dessina, redessina, parti en repérage, posa pour le maître. Et je crois bien qu'après 30 ans, le vieil Hergé le vouvoyait encore...
C'est celui qui a le mieux connu Hergé.
- Jacques Martin arriva
plus tard, en 54, avec ses deux assistants Demarets et Leloup. Martin quitta l'atelier en 72, avec le sentiment d'avoir été exploité (et c'est sans doute vrai), avec de très mauvais souvenirs :
quand on lui parle aujourdhui d'atelier, il explose qu'il les a en horreur, de vraies usines à dessin, qu'il a subit pendant 20 ans au studio Hergé !!
- Leloup commença par dessiner la gare et les chars dans l'affaire Tournesol, et tout ce qui est moto, avions... Il parti chez Spirou en 69 pour y publier Yoko Tsuno
- Van den Branden passa aux studios de 53 à 74. Responsable de tâches administratives, il relisait les dialogues avec Hergé.
- Jo-El Azara y resta de 54 à 61, avant de se consacrer à Taka Takata dans le journal tintin. Il a commencé par gommer les planches, tracer des cadres, calculer
l'emplacement des phylactères, puis, petit à petit, a travaillé aux décors avec Bob DeMoor, enfin à la couleur avec Josette Baujot, coloriste en chef et future madame Azara (ou plutôt Loeckx).
Lui en garde une bonne expérience. Le studio était une bonne école, et Hergé était exigeant, mais toujours poli et aimable. Il a quitté le studio pour un autre atelier, celui de Peyo avec Will,
où il rencontra Jijé, leur père à tous, le maître oublié de la BD.
- Johan, le fils de Bob, arriva peu avant la mort du maître. Il réalisa essentiellement les Quick et Flupke (où il ne s'est pas géné de placer une affiche pour sa série perso
Gaspard de la nuit).
Les différentes tâches
Avant le studio, avec Jacobs, la répartition des taches était très libre. Si Jacobs s'occupait principalement des décors et des couleurs, il lui arrivait aussi d'intervenir sur le scénario, ou de
poser pour des croquis d'attitude.
Avec le studio, Hergé instaura une division du travail, et rationalisa sa propre méthode. Il élabore le scénario et le découpage et c'est vrai que le reste est l'oeuvre de petites
mains... Sur la planche crayonnée, les personnages étaient tous en place mais les décors n'étaient qu'esquisses.
C'est à ce moment qu'interviennent certains de mes collaborateurs qui vont donner forme et vie à ces paysages, ces architectures, à ces véhicules, qui ne sonr encore qu'indiqués.C'est le plus
souvent de documents tirés de revues spécialisées que ces dessinateurs vont s'inspirer. Il faut aussi veiller à ce que ces décors soient bien dans le "style Tintin" : il faut que chacun des
éléments ne soit ni trop simplifié, ni trop détaillé, que chacun d'eux reste à sa place et se fonde dans l'ensemble.
En règle générale, je tiens à mettre moi même à l'encre tous les personnages, quitte à laisser parfois à mes assistants le soin de les habiller. Entre temps, planche par planche, les
dialogues ont été revus, corrigés, simplifiés et tapés à la machine. Suivant le nombre de signes qu'ils comptent, l'emplacement qu'ils vont occuper est calculé.
Bob DeMoor était étonné de voir Hergé sautiller d'une planche à une autre. Il travaille à la page 10, crayonne une case à la page 15 puis revient à la page 7 pour corriger un détail.
La planche part à la photogravure après vérifications. Elle revient quelques jours plus tard avec des épreuves pour les mises en couleur et la mise en place des textes.
La fin
En déléguant à d'autres mains de plus en plus d'aspects de la planche, le dessinateur ne put éviter certaines déperditions. Les images se technicisent et s'atomisent, le style se durcit et le
souci documentaire se fait obsessionnel.
Hergé prend le temps de vivre. Il se tourne vers la peinture. De Holbein à Lichtenstein, de Miro à de Dejaeger, et Van den Berghe, et Warhol, qui réalisa la série de portrait d'Hergé que
l'on sait.
Le piège des studios apparait évident. La machine s'est alourdie, automatisée, et Hergé a perdu contact avec la matière même de son oeuvre. Fin de la ligne claire : début de la ligne raide !
Et puis Hergé meurt, et Tintin aussi. L'Alph art n'est pas terminé et Bob DeMoor est pressenti un moment pour le terminer. Lui qui avait déjà fermé le cycle japonais de Blake et
Mortimer après le décès de Jacobs. Et puis non. Seuls les projets de son fils sur Quick et Flupke feront vivre les ateliers sous perfusion...
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Sources : Wikipedia, Auracan, ActuBD, Les aventures d'Hergé de Stanislas, Bocquet et Fromental, Le monde d'Hergé de Peeters, (à suivre) spécial Hergé
3- Studio Hergé
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